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Les figures de style ou de rhétorique

LES FIGURES DE STYLE OU DE RHETORIQUE

                     La rhétorique est «  l’art de bien parler », c’est l’ensemble des moyens d’expression propres à persuader ou à émouvoir  le lecteur ou l’auditeur. Parmi ces moyens, nous avons les figures de rhétorique (appelées aussi figures de discours) considérées comme des procédés consistant à illustrer, à voiler ou à renforcer une intention (démonstrative, poétique, etc.) ceci se fait par le biais d’une analogie, d’une substitution de mots, d’une opposition, d’une amplification ou d’une atténuation à côté des figures de diction et de construction.
   Poème-support :

Mors

V1         Je vis cette faucheuse. Elle était dans son champ.
               Elle allait à grands pas moissonnant et fauchant,

                Noir squelette laissant passer le crépuscule.
                Dans l'ombre où l'on dirait que tout tremble et recule,

  v5         L'homme suivait des yeux les lueurs de la faulx. 

                Et les triomphateurs sous les arcs triomphaux
                Tombaient; elle changeait en désert Babylone,
                Le trône en échafaud et l'échafaud en trône,
                Les roses en fumier, les enfants en oiseaux,

v10        L'or en cendre, et les yeux des mères en ruisseaux.
                Et les femmes criaient : -- Rends-nous ce petit être.
                Pour le faire mourir, pourquoi l'avoir fait naître? --
                Ce n'était qu'un sanglot sur terre, en haut, en bas;
                Des mains aux doigts osseux sortaient des noirs grabats;

v 15       Un vent froid bruissait dans les linceuls sans nombre;
                Les peuples éperdus semblaient sous la faulx sombre
               Un troupeau frissonnant qui dans l'ombre s'enfuit;
               Tout était sous ses pieds deuil, épouvante et nuit.
                Derrière elle, le front baigné de douces flammes,

v 20     Un ange souriant portait la gerbe d'âmes.

Mars 1854.

Victor Hugo, Les Contemplations (1856)

 

  1. LES FIGURES PAR ANALOGIE
  1. La comparaison : elle consiste dans le rapprochement explicite d’un terme  avec un autre terme, avec lequel elle possède au moins un élément commun de sens. La comparaison repose sur un rapport d’analogie explicité  par une conjonction ou locution conjonctive (comme, ainsi que, de même que,..), un système de comparaison quantitative (plus que, moins que, autant que...), un adjectif de sens comparatif (tel que, semblable à, analogue à, identique à, …), un verbe de sens comparatif (sembler, paraître, avoir l’air de…).


Exemple : Leurs grandes ailes blanches comme des avirons.
 Poème-support : «   Les peuples éperdus semblaient sous la faulx sombre
                                 Un troupeau frissonnant……. », Mors, Hugo
2- La métaphore : Elle établit une assimilation entre deux termes : comparé et comparant sont rassemblés dans un même énoncé sans terme de comparaison.
Exemple : Un gros serpent de fumée noire. Maupassant.
                 « Elle était dans son champ », Mors, Hugo Métaphore du champ
               Si la métaphore est développée par plusieurs termes  (ou sur plusieurs lignes ou vers) : on parle de métaphore filée.
3. L’allégorie : Ce procédé peut se rattacher à la métaphore, mais elle est plus développée. Elle représente de façon imagée (par des éléments descriptifs ou narratifs), les divers aspects d’une idée qu’elle rend moins abstraite. Il s’agit d’un discours présenté sous un sens propre mais qui est là pour faire comprendre un autre sens qui ne s’exprime pas directement on la rencontre dans Les Fables, les proverbes, etc.
Exemple : La femme est une allégorie de l’Afrique.     
Dans le poème « MORS », la faucheuse est une allégorie de la mort
                 L’allégorie peut aussi être une forme de personnification : une réalité abstraite y est présentée  comme un être humain, dans ce cas, le mot abstrait est en général écrit en majuscule.
Exemple : Tu marches sur des morts, Beauté…(Baudelaire).
4. La personnification :Cette figure de style consiste à faire d’un être inanimé ou d’une abstraction un être réel.
Horloge ! Dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous  dit : « Souviens-toi» !
5. La prosopopée : Elle se définit comme un artifice littéraire consistant à faire parler une personne absente, morte, ou une réalité personnifiée.
Exemple : «  Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends. », « Demain dés l’aube … », Hugo.

B. LES FIGURES PAR SUBSTITUTION


1. La métonymie : On remplace un mot par un autre mot, qui entretient avec le premier  un rapport logique.
Exemple : Un regard bleu : en réalité ce sont les yeux, organe du regard qui sont bleus.
Très fréquente dans la langue parlée, la métonymie  désigne par exemple :

  • Un contenu par son contenant : Boire un verre
  • La cause par l’effet : Boire la mort (le poison qui fait mourir)
  • Le lieu pour la fonction qui y est attaché : Etre candidat à l’Elysée ou à la place Soweto (Assemblée Nationale sénégalaise).
  • La chose par le lieu :le Quai d’Orsay
  • L’œuvre par son auteur : j’ai lu un Balzac (un roman de Balzac)
  • La chose par le symbole : les lauriers (pour symboliser la gloire)
  • L’origine pour le produit : acheter une kiréne (une bouteille d’eau minérale)
  • Les instruments pour les corps de métier : C’est l’alliance de la faucille et du marteau : des paysans et des ouvriers.

             La métonymie est aussi un procédé de symbolisation qui permet un raccourci d’expression :
Exemple :     «   Je vous le dis, vous pouvez vous confiez, Madame,

    A mon bras comme reine, à mon cœur comme femme ! »  HUGO

Dans cet exemple le bras désigne la puissance, alors que le cœur renvoie à l’amour.
2. La synecdoque :Proche de la métonymie, la synecdoque consiste à remplacer un mot par un autre mot lié au premier par une relation d’inclusion. Permettant  un certain impressionnisme, la synecdoque peut suggérer :

 - La partie pour le tout : Chaque sénégalais un toit.

                              «  C’était une confusion, un fouillis de têtes  et de bras qui s’agitaient. » Zola

                   «  Vous dites adieu à ces murs que vous allez quitter. » ALAIN

- Le tout pour la partie :Ameuter tout le quartier.

                                        Avoir une bonne cave.

-La manière pour l’objet :Faire périr par le fer.

-Le singulier pour le pluriel :Avoir l’œil attentif

- Le pluriel pour le singulier :faites-lui toutes mes amitiés.

-L’objet par la matière dont il est constitué :Croiser le fer

3. La périphrase : Elle consiste à remplacer un mot par une expression de sens équivalent qui évite une répétition ou donne une explication. La périphrase peut attirer l’attention sur une qualité.
Exemple : La capitale de la France pour symboliser PARIS

              «   Le roi de la forêt » : LE LION

         « Des ténèbres où l’on dort. »(Hugo) : la mort


C. LES FIGURES PAR OPPOSITION :
1. L’antithèse : C’est le rapprochement de deux termes, deux expressions ou deux propositions contrastées. Elle crée un effet de surprise ou un effet comique.
Exemple : Lui regarde en avant, je regarde en arrière. (Hugo)

                  Le défunt n’est pas mort. Molière

Poème-support : « Les roses en fumier, …
                                L'or en cendre,… », Mors, Hugo.

-L E CHIASME est une antithèse dont la deuxième proposition est en ordre inversé par rapport à la première.

Exemple : La lune en plein midi, à minuit le soleil. (Joachim du Bellay)
                   «  Le trône en l'échafaud et l'échafaud en trône, », Mors, Hugo 

2. L’antiphrase : Elle consiste à exprimer le contraire de ce que l’on veut exprimer tout en faisant comprendre ce qu’on pense, généralement par ironie.
Exemple : Quelle explication lumineuse, mais je n’y ai rien compris !

       Oh quel courage ! Pour dénoncer la lâcheté de quelqu’un.

3. Le paradoxe : Il énonce une idée contraire à l’opinion commune afin de surprendre, choquer, d’inviter à la réflexion.
Exemple : Le pénible fardeau de n’avoir rien à faire. (Boileau)
4. L’oxymore : C’est l’association dans une même expression de deux termes contradictoires. L’oxymore, propre à la poésie, crée une nouvelle réalité.
Exemple : « Cette obscure clarté… »

              « Le soleil noir »

Poème-support :

 « Derrière elle, le front baigné de douces flammes, », Mors, Hugo

5. Le zeugma : C’est une alliance de mots où on associe des réalités abstraites et concrètes dans une même structure syntaxique.

Poème-support :

 « Un ange souriant portait la gerbe d'âmes. », Mors, Hugo

 

D. LES FIGURES PAR AMPLIFICATION ET PAR ATTENUATION :


1. L’hyperbole : C’est l’exagération dans les termes qu’on emploie. Elle amplifie  les termes d’un énoncé afin de mettre en valeur un objet ou une idée. Elle crée ainsi, une emphase : courante dans la langue familière, elle constitue un support de la parodie.
Exemple :   Le gouffre de tes yeux.

             De ses mots savants les forces inconnues

             Transportent les rochers, font descendre les nues,

              Et briller dans la nuit l’éclat de deux soleils. (Corneille)

Poème-support :

 « Et les yeux des mères en ruisseaux. », Mors, Hugo

2. L’anaphore : Elle consiste à répéter les mêmes mots, en tète de phrases, de vers successifs ou de groupes de mots. Elle rythme la phrase, souligne un mot, une obsession tout en dégageant un thème.
Exemple : « Trouver des mots forts comme la folie

               Trouver des  mots couleur de tous les jours

                Trouver des mots que personne n’oublie. » (Aragon)

3. Le parallélisme : C’est le fait d’utiliser une syntaxe semblable pour deux énoncés. Il rythme la phrase en mettant en évidence une antithèse.

 Poème-support :

 «  Les roses en fumier, les enfants en oiseaux, », Mors, Hugo


4. La gradation : Elle ordonne les termes d’un énoncé selon une progression (en taille, en intensité). Elle produit un effet de zoom. Elle peut tendre à l’hyperbole.
Exemple : « Je me meurs, je suis mort, je suis enterré. » (Molière)


E. LES FIGURES D’ATTENUATION


1. La litote :On atténue une idée par une tournure moins directe, souvent un verbe à la forme négative. Avec la litote on exprime implicitement beaucoup plus qu’on ne dit.
Exemple : « Va, je ne te hais point.» (Corneille) : je t’aime toujours
2. L’euphémisme :Cette figure consiste à employer, à la place d’un mot, un autre mot ou une expression qui atténue son sens. On dissimule une idée brutale, désagréable ou considérée comme inconvenante.
Exemple : « Le troisième âge. » : Les vieillards.

3. Le pléonasme : C’est une répétition dans un énoncé de mots ayant le même sens : d’aucuns le considèrent comme une faute alors que d’autres l’assimilent à une insistance.
Exemple : Je l’ai vu, dis-je, vu, de mes propres yeux vu. Ce qu’on appelle vu. (Molière)

Poème-support :

 «  L'homme suivait des yeux les lueurs de la faulx. », Mors, Hugo

 

F. LES FIGURES DE RUPTURE


1. L’anacoluthe : Elle met en valeur un énoncé par une rupture de construction syntaxique. Elle crée un effet de surprise.
Exemple : «  Exilé sur le sol au milieu des  huées,

         Ses ailes de géant l’empêchent  de marcher. » (Baudelaire)

 

  1. L’ellipse : On omet des termes qui, cependant, peuvent se deviner. On charge ainsi l’énoncé de tout ce que le lecteur peut deviner.
    Exemple : « A vingt ans, deuil et solitude.» (Hugo)


G. LES FIGURES DE DICTION

1-Le calembour : C’est un jeu de mots fondé sur des ressemblances de sons et des différences de sens.

Exemple : « Le pont Faidherbe n’est pas fait d’herbes. »

« Le café de Touba se boit tout bas »

2- L’antanaclase : C’est l’emploi répété d’un même motrenvoyant chaque fois à un sens différent.

Exemple : « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas. »

3 .La dérivation : c’est l’emploi des mots de la même famille.

 Poème-support : « Et les triomphateurs sous les arcs triomphaux », Mors, V. Hugo.

 

Exemple : « Le franc français aux Français de France »

4. La paronomase :Elle consiste à rapprocher des mots qui se ressemblent phonétiquement dans une phrase.

Exemple : « Qui s’excuse s’accuse », 

« Qui se ressemble s’assemble »

« Qui s’explique s’implique »

5. L’assonance :C’est la répétition d’un même son vocalique dans des mots qui se suivent .Ces mots sont mis en valeur par la répétition insistante du son.

Poème-support : «  Je vis cette faucheuse. Elle était dans son champ.

 Elle allait à grands pas moissonnant et fauchant,

                           Noir squelette laissant passer le crépuscule », Mors, V. Hugo

Exemple : « Le peuple que l’on trne

Trne et promène et déchaine àtraversles théâtres électoraux ». David Diop, Coups de pilon.

L’allitération :C’est la répétition d’un même son consonantique dans des mots qui se suivent. Ces mots sont mis en valeur par la répétition insistance du son.

Exemple :Le peuple que l’on caresse

Comme le serpent caresse sa proie

Mais le peuple qui se soulève

Se redresse

Se cabre

Le peuple qui saura se venger… » David Diop,  Coups de pilon.

H. LES FIGURES DE CONSTRUCTION

1. L’asyndète :C’est une absence de mots de liaison entre deux mots ou groupe de mots en rapport étroit. L’asyndète est un cas particulier de l’ellipse.

2- La polysyndète :A l’inverse de l’asyndète, la polysyndète consiste à multiplier les mots de liaison : conjonctions ou adverbes.

Exemple :

Je vois dans tes yeux les haltes courbées de désespoir

Et l’aube recommençant le coton et les mines

Je vois Soundjata l’oublié

Et Chaka l’indomptable

Enfouis au fond des mers avec les contes de soie et de feu.

David Diop, Coups de pilon

3- La syllepse :C’est une tournure syntaxique consistant à faire l’accord des mots selon le sens et non selon les règles grammaticales.

Exemple :   Syllepse de nombre : « minuit sonnèrent à l’horloge »

Syllepse de genre : «  la sentinelle tira le premier »

La question oratoire : Elle consiste à poser une question à laquelle on répond en même temps.

Exemple : Ne vous avais-je pas dit que j’y étais parti ?

Poème-support : 

Et les femmes criaient : -- Rends-nous ce petit être.
Pour le faire mourir, pourquoi l'avoir fait naître? –

Cette liste des figures de style est loin d’être exhaustive. Force est de constater que la polémique ne cesse d’enfler sur le bien fondé de l’insertion de l’assonance et de l’allitération parmi les figures de style.


M. DIALLO IBNOU

Doctorant ès Lettres Modernes, Option Grammaire Moderne

Professeur de Lettres Modernes (ibndiallo@gmail.com)

 

 

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Commentaires (1)

papa ahmadou mbaye
  • 1. papa ahmadou mbaye (site web) | vendredi 22 novembre 2013
Nul n'entre ici s'il n'est littéraire : j'aime la littérature.

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Date de dernière mise à jour : samedi 26 mai 2018