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La presse à sensation

Les journaux veulent plaire. Ils veulent donc publier les articles que le lecteur désire lire. Or ce lecteur n'est pas naturellement porté vers l'effort intellectuel. Il préfère absorber un aliment qu'il n'aura aucune peine à assimiler, même si cet aliment ne le nourrit pas, même s'il ne lui apporte aucune des " vitamines intellectuelles" ou des " calories culturelles" qui devraient constituer son repas quotidien.
Il n'y a pas tellement d'années, les journalistes, ceux qui rédigeaient les journaux, ceux qui les mettaient en page, qui en assuraient la présentation, avaient pour objectif la défense de certaines idées. Ils voulaient, avant tout, informer et former l'opinion publique. L'informer loyalement et la former intelligemment. Ils voulaient l'orienter à travers les récifs et les incertitudes de la vie politique ou sociale. Et, bien entendu, cette tâche n'allait pas sans une certaine lourdeur, mais elle avait, indéniablement, son utilité et sa noblesse. Tandis qu'aujourd'hui, les journaux beaucoup d'entre eux en tout cas ont renoncé à précéder l'opinion ; ils préfèrent la suivre. Puisqu'il demande des nourritures sans consistance, eh bien, on lui donnera des nourritures sans consistance ! C'est ainsi qu'est née la presse à sensation.
J. Guyau, La Pensée et les hommes.

sunumbir 4/12/2015

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