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Bernard B. Dadié

Saint-Louis du Sénégal

Texte choisi : « Une vieille ville : Saint-Louis du Sénégal » de Bernard B. Dadié

I- Présentation de l’auteur : Bernard Dadié est né en 1916 à Assinie (en Côte d'Ivoire). Il est à la fois poète, romancier, dramaturge, auteur de contes, de nouvelles et de chroniques. Bernard  B. Dadié est mort le 9 mars 2019 à l’âge de 103 ans.

 

II- Texte : Une vieille ville : Saint-Louis du Sénégal

Saint-Louis est une vieille ville qui, comme toutes ses pareilles, à défaut de beauté, se pare d’amabilité. Le sourire constant des habitants, qui semblent tous se connaître, voile la teigne et les granulations de plaies, les échancrures, les rugosités, les pelades des murs. Des maisons à étages, des balcons, des portes cochers, des égouts à ciel ouvert. Des enseignes éborgnent les rues. Un palmier chauve, qu’on prendrait pour un grand goupillon agité par une main invisible pour bénir les hommes ; des cochers sur leurs charrettes bancales, geignantes ; femmes en grande mousseline, servantes traînant de lourds sacs de vivres. Devant les échoppes des cordonniers et des bijoutiers, les vieux, la tête enturbannée, lisent des journaux, suivant la ligne du doigt, commentent les événements du jour. Des marchands ambulants, mégots derrière l’oreille, promènent, tenus par les pattes, des poulets qui ouvrent de gros yeux. Un fourneau, devant une porte, crépite et lance des étincelles en tous sens.

Là-bas, jalonné de cocotiers, le fleuve ressemble à une terre dénudée, ratissée, nivelée, tant il est calme, immobile. Pas le moindre voilier. Une boulangerie. Voyez-vous cette queue hurlante, gesticulante, ce long ruban de femmes, d’hommes et d’enfants, d’om les mains surgissent tout à coup, comme des tentacules de pieuvres, pour saisir un linteau, agripper une épaule, un pagne, un boubou, une veste ?

Des chats sur le pas des portes vous regardent passer.

Quel est cet attroupement sur le quai encombré de chalands, de remorqueurs, de voiliers ? C’est un départ de convois vers le haut fleuve. Un véritable marché se tient ici. On y vend du pain, des mangues, des dattes, des goyaves, du jujube, des citrons de toutes les grosseurs, des cacahuètes, des sandalettes, des parfums, etc.  Ouolofs, Peuls, Maures, militaires, femmes, gendarmes, tous vont et viennent, enjambent des ballots de tissus, se coudoient, parlent, rient aux éclats, se hèlent. Des tirailleurs chargent un vapeur. Une sentinelle relevée dort, tout équipée, sur une plaque de zinc, la tête sous une couverture. L’eau scintille, miroite. […]

Le moteur ronfle. Sur la passerelle, un Européen, les mains dans les poches de sa culotte kaki, prend le frais, sa chemise bleue gonflée de vent. Un traitant marocain réitère les dernières instructions à son agent. Trois coups brefs de sirène. Un remous d’eau. Des câbles lentement émergent de l’onde, s’éprouvent, crissent sur les bords des chalands, geignent, se tendent. Une violente secousse, et le convoi s’ébranle. Trois autres petits coups de sirène, que les applaudissements et les cris des passagers essaient d’étouffer. Levée de mouchoirs et de bras qui s’agitent pour dire au revoir.

   Bernard B. Dadié, Climbié, Seghers, 1952.

III- Quelques axes de lecture

  • Le regard de Climbié sur la ville de Saint-Louis
  • Qu’est-ce qui justifie le titre du texte ?
  • Une ville animée
  • Qu’est-ce qui renvoie au marché du port ? au départ du bateau ?
  •  
  • IV- Insistons sur :
  1. La comparaison : « La comparaison implique le rapprochement de deux mots (le comparé et le comparant) sous un rapport d’analogie que précise un outil de comparaison.

Exemple : « le fleuve ressemble à une terre dénudée, ratissée, nivelée, tant il est calme, immobile »

2- La dérivation

La langue française crée de nombreux mots en ajoutant des affixes à une base appelée radical :

  • Les préfixes précédent le radical et sont d’origine grecque ou latine ;
  • Les suffixes suivent le radical et sont lié aux différentes classes grammaticales

On appelle ce procédé de création la dérivation.

Exemples : « la tête enturbannée »

La préfixation : « invisible »

La suffixation : « sandalettes »

3- Le verbe « geindre »

« Geindre » est un verbe (intransitif) du troisième groupe. Il peut avoir le sens de «  se plaindre », se lamenter, etc.

Exemple « Des câbles lentement émergent de l’onde, s’éprouvent, crissent sur les bords des chalands, geignent, se tendent. »

10/03/2019

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